LE ZODIAQUE DE L'AME
Sur la
route de la vie, petit enfant tu marches pour toucher avec la
flamme
de ton coeur le doux rayon du soleil qui se lève.
A ton premier pas, j'ai déposé dans l'arche d'alliance le
secret ultime qui
anime la ronde des univers. Je t'ai donné la force de vivre et
de créer afin
que tu accomplisses en ta maison ce que le Très-Haut entrevoit
pour sa
création. Je t'apporterai le pour et le contre, le mal et la
joie, le
sourire et les larmes ; et comme le phénix sacré qui garde la
porte de
l'origine du tréfonds des âges, tu renaîtras de part et d'autre
de la mort
afin que le glaive de l'amour tranche par ton bras l'imperfection
du monde,
que la puissance de Ma croix sorte de la torpeur les fantômes
qui empêchent
l'homme d'être. Pour toi, J'ai érigé la croix qui appelle les
anges de
l'univers terrestre à s'unir aux anges des sentiers célestes.
A ton second pas, J'ai gravé en ton coeur la voix de la
reconnaissance
divine. J'ai déposé sur ton front glorieux l'émeraude de la
vertu suprême,
celle au coeur de laquelle les âmes fatiguées viennent se
ressourcer et
s'abreuver du souffle nouveau. Je t'apprendrai à oeuvrer pour
celui que tu
reconnais être le Maître de ton existence et te donnerai pour
cela les feux
de la tempérance et de la patience ; par ces deux trésors, tu
fermeras les
mains, le coeur et le regard aux illusions qui tentent de te
détourner. Je
t'apporterai une terre fertile et neuve où nous ferons ensemble
les
semailles des temps nouveaux. Divin laboureur du royaume
céleste, tu
traceras à chaque nouvelle saison les sillons qui recueilleront
la rosée
nouvelle, et tu nourriras de ta propre sueur la terre que tes pas
auront
foulée.
A ton troisième pas, J'ouvrirai sous tes yeux la diversité
somptueuse des
sphères de la vie. Je te donnerai l'élan et la sincérité afin
que tu
découvres la porte qui garde le secret d'un coeur immense, et Je
te parlerai
sans mots, sans nuls maux, de l'espoir renaissant des Maîtres
envers la race
des hommes, du feu qui adombre sans faiblir chacune de tes
pensées comme
chacun de tes silences. Je déposerai sur ton coeur souriant de
tant
d'immensité la gerbe de la croissance et l'étoile du divin
partage, celle en
laquelle tu gravis, avec émerveillement, la montagne de la
Vérité. Tu
parcourras, comme l'enfant confiant, chacune des lignes du livre
de la Vie
et J'offrirai en ton être le sacrifice de la connaissance
ultime. Tu
parleras de ce que tu apprends car grand est ton élan à
retransmettre, et tu
combattras sans relâche ce qui dresse de hautes et vastes
frontières entre
l'homme et l'Homme.
Plus tard, tu ouvriras les yeux sur ce que tu connais de
toi-même et Je
déposerai sur ta tête la couronne des origines célestes. Tu
suivras sans
relâche le rythme de ta dévotion à ce que tu sais être juste,
et tu
protégeras de tes ailes soyeuses la grande vérité de nos
secrets fragiles.
Je te confierai le sceptre de la création et les noms des quatre
maîtres
cardinaux afin que tu retrouves en ta terre profonde la lumière
du précieux
cadeau qu'Il y cachât pour toi, bien avant ta venue. Tu seras le
précieux
ouvrier qui bâtira le monde, inspiré par la vision qu'à ton
origine il te
fut donnée.
A ton cinquième pas, l'enfant que tu es s'affirmera et parlera,
d'abord de
lui-même puis au-delà de soi. Tu parleras de ces routes qui
guident les
hommes vers ce quils ont de plus haut, mais aussi de plus
bas. Tu parleras
de ces coeurs aimants dans ce qu'ils ont de plus grand et de plus
petit.
J'appellerai pour toi la Sagesse antique des scribes de l'histoire,
et tu
combleras de ta vie les chaînons qui manquent à la ronde des
aspirants. Je
forgerai en toi la grandeur et la force de Mon Verbe sacré afin
que
quiconque n'oubliât jamais l'essence de ce qui fut énoncé. Mes
mains sur ton
coeur, Je ferai jaillir de ton être la gloire du soleil
triomphant, et ton
sang se versera sur la terre qui appelle, afin que la sève de
lumière qui
s'écoulera de toi aille ressusciter les racines les plus
profondes, afin que
les mondes renaissent à nouveau et afin que tu nous retrouves
dans l'amour
de tes frères.
A ton sixième pas, Je te donnerai le feu ardent de ta
révélation et Je
citerai dans le secret de tes oreilles les paroles d'un Père à
son Enfant.
Bercé dans le ventre de ta Mère depuis la source des
éternités, tu pousseras
ton premier cri, Souffle de Vie qui embrasera chaque parcelle de
ta matrice
divine, et tu réaliseras l'union du Père et de la Mère, dans
la dignité et
le respect de leur Files. J'ôterai de tes pieds les sandales de
la
renaissance afin que désormais tu puisses réellement jouer,
comme un petit
enfant dans le jardin du monde. Tu parleras au vent et tu
chanteras la
pluie, tu loueras la neige et déplaceras les éléments, car tu
auras loué ta
Mère et glorifié ton Père, arrêtant par là-même la lente
courbe du temps.
J'offrira jusquaux limites de ton sourire les gouttes
étincelantes versées
en silence pour la paix. Héritier du passage des morts à la
vie, porte entre
le chant des mondes et leur félicité triomphante, tu enfanteras
sans douleur
et dans lamour du pardon du Très-Haut, dévoilant l'ignorance.
En ce jour de la ronde de ta vie, l'espace divin se déploiera
sous tes pieds
et tu sentiras désormais le poids de chacun de tes efforts. Je
te confierai
la mémoire des temps anciens, et comme l'architecte des sacrées
cathédrales,
tu partiras, tel le compagnon uni par notre secret, à la
recherche d'un
nouveau lieu où bâtir la maison du Très-Haut. Sous le flot
rayonnant de la
flamme triple qui inonde de sa force les sépultures du temps
venu, tu
lèveras la tête, et dans un coeur en offrande, tu recevras le
sceau de
l'ultime providence et de la magie céleste. En toi et par toi se
rejoindront
à tout jamais les sentiers qui gardent le seuil du destin
éternel, et nous
chanterons ensemble, d'une même voix, le temps de la
résurrection enfin
arrivée et le règne de l'immortalité.
A ton huitième pas, tu deviendras enfant de douceur et de
compassion. Nous
partagerons ensemble le pain de la vie, et Je te montrerai le
chemin déjà
accompli. Tu contempleras le sentier rocailleux de la découverte
de soi, et
Je te confierai, au coeur de la terre même, le diamant aux sept
couleurs qui
chante le Verbe de l'offrande recueillie à Celui qui demeure à
tout jamais
en toi. Tu poseras devant la vie éternelle tout ce que tu es, et
tout ce que
tu n'es plus, afin que les voiles somptueux de la conscience
première te
soulèvent et te portent sans effort jusqu'aux portes du nouveau
royaume,
jusqu'aux portes de ta maison enfin retrouvée. Pieds nus, la
robe immaculée
du temps de tes épreuves, tu graviras la colline où de là Je
te montrerai le
chemin qui conduit à la Croix des Frères de Compassion et de
Sagesse.
A lentrée de ce nouveau chemin tu te présenteras et Je
parlerai devant tous
afin de te présenter à nos frères du monde. Je te confierai la
part du
dessein auquel la vie t'appelle et tu chanteras la gloire du
Très-Haut. Il y
a bien longtemps déjà, Il a caché du regard des hommes le
Temple de la
résurrection. Mais pour guider ta route, Je déposerai à chacun
de tes pas,
petit souffle mélodieux de vie, les flèches de la voie
suprême, celles qui
feront de toi le divin sage, gardien de la croissance sincère
des hommes. Tu
leur montreras, par l'exemple que Jaurai fait de toi, que
dans tout but
fixé quil faut atteindre, les trois anges de l'action
doivent être en union
parfaite : l'acteur originel, la création et le but qu'elle doit
atteindre.
J'ai gravé en ta terre encore vierge de tout péché, enfant
chéri, les tables
de l'action des lois, lois qui unissent chaque membre de la race
humaine, et
de là, chaque membre de la Hiérarchie. J'ai scellé en ton
verbe le pouvoir
d'interpeller et le souffle de laspiration sans cesse
renouvelée. Déposes
alors à tes pieds ce que la dualité maintient dans Son secret :
seul le
doute se revêt du chaos, seule la peur se nourrit du doute. N'aies
crainte
de ce que tu es, car ton sol sacré est celui de la liberté
nouvelle.
A l'entente du Mot qui créa le monde, l'Enfant surgit de lunivers
serein et
entra dans la vaste sphère des Anges de la rédemption. Sans nul
mot, ils
demeuraient depuis la nuit des temps, accueillant dans le Feu du
Coeur
nouveau le nouveau né parmi l'univers des formes. Et soudain, un
doux
souffle de compassion vint étreindre les hommes<sum> Et
soudain, les Flammes
Divines s'élancèrent pour embrasser le souffle damour ; cest
alors que
l'Univers s'unit à lui-même, en chaque parcelle de l'éternité.
La terre
glorifia Sa semence, et chacun honora la royauté suprême. Car l'Enfant
s'était réveillé et se leva, les mains tendues vers le Père,
et dit : « O
Père de douceur et de félicité, Tu as accompli en mon coeur
offert à Ta
plénitude la vérité et la sagesse de Ta volonté<sum> O
Mère, Tu as été le
terrain fertile et chatoyant de fleurs en lequel j'ai pu m'épanouir
; Tu as
été la secrète gardienne de mes rêves soyeux. O Univers
éternel, me voici au
portail du jugement dernier. Que ton humble fils soit l'atome
précieux de
Ton silence et que s'accomplisse ce pour quoi le monde est. » Et
le tonnerre
retentit, et les nuages recouvrirent le ciel. Devant l'Enfant
agenouillé se
révéla la Montagne secrète au sein de laquelle les âmes s'offrent
au Feu du
Coeur Universel. Un éclair bleu vint trancher la terre,
dévoilant, comme
cachée du regard des hommes depuis la nuit des temps, la Croix
de l'Ultime
Sacrifice. De son coeur flamboyant sortaient mille rayons qui
semblaient
s'envoler pour illuminer le ciel et la terre<sum> L'orage
cessa, les nuages se
retirèrent, et des nuées descendirent les Ouvriers du sacré
oeuvrage.
Lorsque l'Enfant regarda autour de lui, c'est l'humanité toute
entière qu'il
retrouva à ses côtés. Alors il sut que rien n'était perdu. Et
l'Enfant
disparut du monde.
Lorsque sera signée l'heure de ton retour à la face des hommes,
saches que
plus jamais tu ne seras le même. En ce onzième pas de ton long
pèlerinage,
Je garderai les portes du passé car tu es encore fragile. Tu
apprendras ce
que la vie ancienne tauras déjà fait connaître afin que
tout soit consommé,
et les racines de ta curiosité comme de ta liberté seront les
traces de ta
prime jeunesse. Tu retraceras en ton corps les routes qui ont
déjà été
accomplies afin que passé, présent et avenir ne soient plus qu'un
en ton
âme. Je te donnerai la harpe céleste du chant de l'Ange qui
garde Ma couche
et Me veille contre la nuit et contre le jour. Dans le secret du
silence qui
abreuve ton être, Je ferai s'écouler la sève cristalline de l'Amour
nouveau,
et Je t'offrirai un secret baiser qui embrasera l'essence qui te
porte.
Marche après marche, tu graviras le chemin qui rapproche de la
Source, celle
en laquelle s'abreuvent les coeurs fatigués, et Je ferai de toi
l'éclaireur
de ce sentier, afin que chacun puisse venir me retrouver ; par
delà le
désert ; par delà le désir ; par delà la honte de la
perdition. Tu seras le
porte-parole du Verbe, et Je graverai en chacune de tes pensées
la loi de ce
qui est et celle de ce qui n'est pas. Sur ton front sera scellée
la marque
de notre reconnaissance, et chaque parole que tu verseras de Moi
sera le
flot qui nourrira la race nouvelle.
Sur l'île aux verdoyants pâturages, tu regarderas une dernière
fois les
nombreux rivages au long desquels tu as marché. Et dans la
secrète caresse
d'une douce brise océane, Je t'envelopperai à tout jamais de lAmour
de
lHomme pour Ses frères. Tout sera désormais sans passé,
ni présent, ni
avenir. Ta vie sera devenue sentier silencieux que trace
voluptueusement les
étoiles du ciel divin. Et là, tout sera glorieux, tout sera
sanctifié, tout
sera désormais accompli.
Du ciel descendit alors un halo de lumière d'or, et une mélodie
nouvelle
semblait animer le monde du Très-Haut. Lorsque le Feu vint à
toucher la
terre, Il se répandit en chaque région, chaque nation, chaque
pierre et
chaque sentier qui revêtissent la fibre de l'humanité. Cest
alors que
l'Enfant apparut de nouveau, tenant en sa main le flambeau de lAmour
accompli. Il posa un genou à terre et leva le Feu céleste vers
le ciel, le
regard enveloppant l'univers entier, le coeur aimant. La ronde
des mondes
arrêta sa course pour ne laisser que la trace du silence
éternel, et lorsque
s'éleva au zénith le soleil de la grâce divine, la colombe de
la paix
descendit enfin parmi les hommes. Plus rien n'était que ce qui navait
jamais cessé dêtre. Le vent chantait la gloire
éternelle, et nul souvenir
du chemin parcouru ne pouvait plus, désormais, déranger la
contemplation de
la Terre en le Ciel, et du Ciel en la Terre. Alors il ne resta
plus qu'une
pensée une ; alors il ne resta plus qu'un Amour un ; alors toute
dualité
seffaça à jamais du regard de lEnfant qui,
brandissant le Feu Céleste,
avait tout remis de lui-même ; lui, pourtant porteur du flambeau
de la
liberté. La Croix du Sacrifice élança ses bras comme pour
ceindre l'Univers
de son coeur vertueux, et en cet instant sarrêta à jamais
la douleur et les
déchirures du temps. Dans un ultime baiser secret en nos
consciences unes,
Je m'approchais de toi pour poser en ton front le regard suprême
de
l'éternelle reconnaissance possible, reconnaissance promise,
reconnaissances
véritables engendrées depuis la nuit des temps. Je ferai
désormais de toi le
porteur du coeur de l'Agneau, le porte-parole de l'Amour du
Seigneur des
Mondes qui, désormais, armeras ton bras et ta volonté de la
puissance et de
la lumière. Tu seras l'urne de la dévotion en laquelle les
hommes fatigués
viendront puiser l'illumination, puisque toi, qui as vu Mon
visage, me
reconnais en chacun deux.
MARC DUNAND